​Il faut d'abord utiliser les bons mots

  • « Poteaux », ou « grosse patte » : ces termes ne sont pas scientifiques, ils désignent simplement dans le vocabulaire des gens de chevaux que le cheval a un ou plusieurs membres déformés par un volume plus ou moins généralisé. Par erreur, cela désigne même parfois une tendinite, mais dont la déformation est bien plus localisée.
  • « Œdème » : ce mot scientifique désigne une accumulation de liquide dans les tissus, sans présumer de la cause. Donc une grosse patte est une patte œdématiée.
  • « Engorgement » : encore un synonyme souvent employé, mais qui désigne plutôt quelque chose de pas trop grave qui n’affole pas le soigneur du cheval
  • « Lymphangite » : Là ça devient grave, ou ça risque de le devenir, c’est une infection et une inflammation ascendante d’un ou plusieurs membres, et c’est une urgence.

L'engorgement « simple » du cheval

Les symptômes de l’engorgement

On observe un ou des membres un peu épais, « pâteux », moins bien dessinés et secs que ce qu’on a l’habitude de voir. Entre autres signes, on a du mal à distinguer les tendons : il faut donc toujours faire attention à ne pas passer à côté d’une tendinite masquée par un engorgement.

Les symptômes de l’engorgement

A gauche : membres sains, secs, tendons observables.
A droite : membre engorgé, œdème diffus, tendons non observables.

Les causes de l’engorgement

Elles sont nombreuses et plus ou moins graves :

  • Une station immobiles prolongée : certains chevaux se déplacent très peu au box ;
  • Un mauvais retour veineux ou lymphatique…

Mais il y a aussi des causes plus graves, comme la lymphangite que nous allons aborder, et également des maladies générales qui peuvent entraîner un œdème des membres (l’Artérite Virale par exemple).

Ce qu'il faut faire :

  1. Palper, vérifier l’absence de douleur et/ou de croûtes, de petites plaies, surtout en face interne et dans le creux du paturon. S’il y en a, il y a un risque de lymphangite ;
  2. Marcher le cheval au pas en main une demi-heure. Cela doit nettement faire dégonfler le membre, si ce n’est pas le cas appeler le vétérinaire ;
  3. Faire des soins d’hygiène.

La lymphangite chez le cheval

Qu’est-ce que la lymphe ?

Si tout le monde sait ce qu’est que le sang*, on sait souvent moins bien ce qu’est la lymphe, alors qu’elle est largement aussi importante.

La lymphe est un liquide blanc jaunâtre, qui « baigne » et circule dans tout le corps. Lorsque vous vous faites une petite plaie, c’est le liquide translucide et légèrement jaune que vous voyez perler à la surface de la peau. La lymphe ne circule pas dans des « tuyaux » comme le cœur, mais dans des « canaux ». Elle n’est pas en circuit fermé mais circule comme un cours d’eau, formant des rivières et des fleuves.

Il y a environ le double de litres de lymphe que de litres de sang.

* Le sang, de couleur rouge, alimente le corps,contenu dans des vaisseaux (artères ou veines). Composé de globules rouges et de globules blanc, le sang représente en volume 1/13ème du poids du corps chez les mammifères (donc 5 à 6 litres chez l’humain, et 35 à 40 litres chez un cheval)

Les symptômes de la lymphangite

Sans rentrer dans les détails de ce schéma, ce qui est très important à comprendre c’est que la lymphe descend vers le bas du membre en face externe du membre, et qu’elle remonte vers le haut du corps en passant par l’intérieur. Et que la lymphe est présente juste sous la peau.

Les symptômes de la lymphangite

Les causes de la lymphangite

Donc, pour qu’une lymphangite se produise :

  1. Plaie cutanée, parfois petite, parfois invisible à l’œil nu, mais souvent détectable en palpant soigneusement la peau. Plaie la plupart du temps en face interne du membre, souvent basse, et très souvent dans le creux du paturon (dont les crevasses). Vu ce que nous venons d’observer sur le schéma, les plaies face interne des membres que les plaies en face externe ;
  2. Mauvaise hygiène de la litière et/ou des membres ;
  3. Pénétration de bactéries par la voie d’entrée cutanée ;
  4. Contamination et infection sous cutanée de la lymphe, d’abord locale ;
  5. Puis contamination ascendante en suivant le courant ascendant de la lymphe en face interne ;
  6. Au pire, risque d’infection généralisée, heureusement peu fréquente.

Tout signe de gravité doit vous faire appeler le vétérinaire :

  • Douleur et suppression d’appui ;
  • Fièvre ;
  • Lymphangite dépassant le genou et le jarret ;
  • Chaleur en face interne au-dessus des genoux ou des jarrets.
Si vous tardez les séquelles (lymphangite chronique) peuvent être irréversibles.

Si c’est une lymphangite débutante, que vous avez prévenu votre vétérinaire que vous alliez commencer par faire des soins locaux et le tenir au courant de l’évolution, nous aborderons ces soins d’hygiène générale et particulière dans un prochain article.

Dr Aude Lhérété, vétérinaire et rédactrice